Généralités sur le sommeil à l’enfance et l’adolescence

GENERALITES SUR LE SOMMEIL DE L’ENFANCE A L’ADOLESCENCE

INTRODUCTION

Le sommeil est un état physiologique dans lequel nous passons environ le tiers de notre vie. Il fait partie des fonctions vitales de l’organisme comme la respiration, la digestion ou l’immunité.
Le sommeil joue un rôle clé pour l’état de bien-être dans la journée : le repos allongé et l’immobilité nous permettent de récupérer d’une fatigue physique.
Le sommeil est également indispensable au maintien des fonctions d’apprentissage, de mémorisation et d’adaptation à des circonstances nouvelles. Le sommeil permet en effet de maintenir les connexions entre les neurones (synapses) pour consolider la mémoire. Pour bien se souvenir de ce que nous avons appris pendant la journée, il faut dormir. Le sommeil favorise ainsi le stockage et l’organisation de nouvelles connaissances. Cette fonction a lieu pendant le sommeil profond, ce qui suggère que celui-ci jouerait chez l’enfant un rôle décisif dans la maturation du cerveau
Le sommeil a également un rôle dans un certain nombre de fonctions biologiques comme l’immunité et la croissance. En effet, l’hormone de croissance est sécrétée essentiellement au cours du sommeil profond.
La quantité et la qualité du sommeil sont donc fondamentales pour le développement neurocognitif, les apprentissages, le comportement, la croissance et le bien-être de l’enfant. Vous trouverez ci-dessous quelques notions générales sur le sommeil de l’enfant ainsi que des recommandations pour un bon sommeil !

CARACTERISTIQUES PAR TRANCHE D’AGE

Nouveau-né

A la naissance, le nouveau-né dort beaucoup, en moyenne 16 à 18 heures par 24 heures. Ce temps de sommeil est variable d’un bébé à l’autre avec déjà à cet âge des « gros » et des « petits » dormeurs.
A cet âge, le rythme sommeil-éveil est très variable, sans distinction entre le jour et la nuit.
Le sommeil du nouveau-né comprend 2 stades : le sommeil calme et le sommeil agité.
• Le sommeil agité est essentiel du fait de l’importante activité cérébrale (comme les rêves) qui se produit pendant cette période. Le sommeil agité est caractérisé par une respiration plus rapide, ainsi que des petites grimaces, des sourires ou des mouvements des bras ou des jambes, qui sont tout à fait normaux.
• Pendant le sommeil calme, les mouvements sont quasi absents.
Chaque cycle de sommeil calme et agité dure environ 50 à 60 minutes avec des réveils fréquents à la fin d’un cycle.

1 à 6 mois

Pendant les premiers 6 mois, la durée du sommeil est de 14 à 15 heures par jour, une variabilité ± 2,5 heures étant considérée comme normale.
L’enfant dort environ 6 heures la nuit avec 3 siestes pendant la journée (matin, début d’après-midi et fin d’après-midi). L’endormissement se fait en sommeil agité qui prend le nom de sommeil paradoxal à partir de 3 mois.

6 mois à 2 ans

La durée du sommeil diminue progressivement pour atteindre 13 à 14 heures à l’âge de 1 an. La sieste de la fin d’après-midi disparaît en premier, suivie de la sieste du matin.

2 à 6 ans

La durée de sommeil diminue encore, de 11 à 13 heures environ à l’âge de 6 ans avec la persistance de « petits » et « gros » dormeurs. A partir de l’âge de 3 ans, 95% des enfants ne font plus la sieste et se couchent alors un peu plus tôt le soir.
Les parasomnies (cauchemars, terreurs nocturnes, somnambulisme) sont fréquentes à cet âge et s’observent lors de la transition entre les différents stades de sommeil, généralement en milieu de nuit.
Les éveils pendant le sommeil sont physiologiques jusqu’à l’âge de 3 ans. Ils sont caractérisés par le fait que les enfants n’arrivent pas à s’endormir seuls. Ils ont tendance à disparaître spontanément.

6 à 10 ans

La durée de sommeil diminue encore de 11 à 9 heures et elle est exclusivement nocturne.
En cas de sieste diurne, il faut penser d’abord à une privation du sommeil et puis à une hypersomnie. Un temps d’endormissement un peu plus long est normal.

Adolescence

Le besoin de sommeil augmente à cet âge et est d’environ 9 à 10 heures.
L’adolescent a un profil « couche-tard / lève-tard » car l’horloge interne est en faveur des activités du soir, les habitudes sociales changent avec une prédominance et une préférence pour les activités du soir : télévision, smartphone, ordinateur, sorties. Comme les contraintes scolaires nécessitent un lever tôt, l’adolescent accumule une dette de sommeil, responsable d’une somnolence matinale. Cette dette de sommeil peut être responsable d’un déficit d’attention, de troubles de la mémoire engendrant de mauvais résultats scolaires, et de troubles de l’humeur avec une irritabilité, une impulsivité et/ou une hyperactivité. Les adolescents ont tendance à abuser de stimulants comme la caféine et d’autres boissons excitantes ou énergisantes.

Figure 1 : Evolution du sommeil en fonction de l’âge

sommeil enfant

A gauche : âges. A droite : durée moyenne du sommeil à chaque âge (l’écart à la moyenne est environ de 2H).
En blanc: états de veille. En bleu: sommeil nocturne. En jaune: sommeil de jour (siestes).
D’après Challamel et Thirion. Le sommeil, le rêve et l’enfant. Albin Michel 1999

REGLES D’HYGIENE DU SOMMEIL

Les horaires

Les horaires de lever et de coucher doivent être réguliers afin de donner des points de repère à l’horloge biologique.
Si l’enfant dort beaucoup la journée, on peut le réveiller, surtout en fin d’après-midi pour éviter que la sieste de fin d’après-midi ne retarde l’horaire du coucher. En général, l’enfant devrait avoir des périodes d’éveil d’au moins 3 heures avant chaque sieste et de 4 à 5 heures avant le sommeil de nuit.
Pour les enfants d’âge scolaire, il ne faut pas s’éloigner trop des horaires de la semaine le week-end, même si la tendance serait de se lever plus tard le matin.
Les horaires sont à déterminer avec la famille selon leurs possibilités et habitudes, l’importance étant la régularité.
Les horaires des repas, du travail et des activités pendant la journée sont aussi importants, le but étant d’avoir une routine assez stable.

Les activités pendant la journée

La qualité de notre sommeil dépend de la qualité de notre période d’éveil; pour cette raison c’est très important que l’enfant soit actif pendant la journée. Les activités physiques et intellectuelles sont à éviter en fin de journée pour éviter les difficultés d’endormissement.
Pour l’enfant en bas âge, il faut privilégier les activités et les jeux quand l’enfant est éveillé entre 2 siestes. Pour l’enfant d’âge scolaire, il faut éviter de faire les devoirs et les activités sportives le soir, et surtout pendant les 3 heures qui précèdent le coucher.
Les adolescents sont souvent amenés à avoir des activités du soir. Là encore, les recommandations sont d’essayer d’éviter les activités excitantes le soir et de privilégier les activités calmes et relaxantes. Si un soir par semaine (exemple le samedi soir), ils y dérogent, il est important de reprendre les mêmes habitudes et les mêmes horaires dès le lendemain pour éviter un décalage de phase.

L’association entre lit et sommeil et le temps passé au lit

Pour l’enfant et l’adolescent, le lit doit être associé au sommeil. Pour cette raison il ne faut pas utiliser le lit pour d’autres activités que le sommeil: il ne faut pas
 regarder la télévision au lit
 manger au lit
 travailler, jouer ou étudier au lit
 rester au lit pendant la journée
 Il faut se lever du lit quand on ne dort pas
Il est important de mettre l’enfant au lit quand il est encore éveillé (et non quand il s’est déjà endormi comme par exemple dans la poussette) pour lui apprendre à s’endormir seul : le lit doit être l’endroit où on dort. De plus, l’enfant ne se réveillera pas dans un milieu différent de celui dans lequel il s’est endormi. Ainsi, il ne sera pas surpris et n’aura pas peur quand il se réveillera. De même, il faut éviter de mettre l’enfant au lit quand il est trop éveillé ou trop excité car il va s’ennuyer au lit, il est important de choisir le bon moment pour le coucher.
Il ne faut pas associer au lit les moments d’angoisse. Le soir au coucher, l’enfant peut avoir des petites angoisses (l’école, les copains…) qui peuvent gêner l’endormissement. Pour éviter ces angoisses, on peut prévoir un moment le soir, 1 ou 2 heures avant le coucher, pour en parler avec lui. Vous pouvez proposer à votre enfant de noter sur un cahier, d’un côté ce qui le préoccupe et de l’autre côté la stratégie mise en oeuvre avec les échéances. On peut dédier à cette activité un endroit fixe de la maison, comme un fauteuil qu’on pourra appeler le «fauteuil des soucis». Il est important que ce fauteuil ne soit pas dans la chambre à coucher. Ensuite, il faut consacrer un certain temps à des activités calmes et reposantes pour que l’enfant puisse se coucher sans soucis et angoisses.

L’importance des rituels

Une activité rituelle exercée le soir avant de se coucher favorise l’endormissement en représentant le passage entre la vie diurne active et le «temps du sommeil et du repos» la nuit. Le fait de mettre le pyjama, se brosser les dents, lire un petit conte avec une lumière de faible intensité dans un environnement calme, aide l’enfant à s’endormir plus facilement. Pour les enfants en bas âge, le rituel du coucher permet aussi d’éviter l’angoisse de la séparation parentale.
Pour l’enfant d’âge scolaire et l’adolescent, des techniques de relaxation et des techniques cognitives comportementales peuvent être utiles.

La lumière

La lumière a un pouvoir activateur sur notre cerveau, en particulier la lumière du soleil quand on se lève le matin. La lumière inhibe la sécrétion endogène de mélatonine qui est une hormone qui indique à notre horloge biologique que c’est le moment de s’endormir. Il faut donc exposer l’enfant à la lumière extérieure le matin et en début d’après-midi en essayant de concentrer les sorties pendant la journée plutôt que le soir.
Le soir, par contre, il faut éviter de s’exposer à la lumière. Pour l’adolescent, il faut absolument éviter tablette, Smartphone et ordinateur pendant au moins 2 à 3 heures avant l’heure du coucher. Comme la lumière de la télévision est moins puissante et plus distante, elle est moins nocive pour l’endormissement.

La température

La période du sommeil se situe normalement autour de la température corporelle minimale. Pour faciliter l’endormissement, il faut favoriser une courbe de température corporelle descendante. Il faut donc éviter d’utiliser au coucher de l’eau trop chaude pour la toilette, il faut diminuer la température de la chambre, éviter les boissons trop chaudes et éviter les activités physiques intenses qui augmentent la température corporelle.

L’alimentation

Pour le nourrisson, en particulier pendant l’allaitement, il est difficile d’établir le nombre de repas nécessaires, l’importance étant la régularité des horaires de repas qui aident à synchroniser l’horloge biologique.
Pour l’enfant d’âge scolaire et l’adolescent, il est recommandé d’avoir au moins 3 repas par jour à des horaires fixes pour donner des points de repère à l’horloge biologique.
• Le petit déjeuner doit être consistant car l’enfant est à jeun depuis au moins 8 à 10 heures.
• Au déjeuner, il faut limiter les sucres rapides car ils augmentent la somnolence, par contre les protéines favorisent la vigilance, spécialement la viande rouge.
• Le dernier repas doit être pris au moins 2 heures avant l’heure du coucher pour favoriser la digestion. Le dîner doit être léger mais consistant pour permettre au corps d’avoir un apport énergétique suffisant pendant la nuit pour éviter d’être réveillé par la faim. Il faut donc privilégier les aliments à base de sucre lents ou féculents (pommes de terre, riz, pain, pâtes).
L’adolescent a tendance à utiliser des excitants pour étudier le soir ou pour sortir, afin d’être plus performant. Ces excitants altèrent le sommeil et favorisent la somnolence pendant la journée d’où l’installation d’un véritable cercle vicieux. Il faut donc éviter les excitants après 14 heures, notamment le café, le thé, la nicotine et autres boissons énergisantes ou excitantes. La caféine est présente dans le café (à savoir qu’il y a plus de caféine dans le café allongé que dans le café serré), le thé, le Coca Cola et boissons similaires, le chocolat (100 g de chocolat noir contiennent l’équivalent en caféine d’une tasse de café) et dans les boissons énergétiques. La nicotine a également un pouvoir stimulant en augmentant le temps d’endormissement, les réveils nocturnes et elle modifie l’architecture naturelle du sommeil.

Autres substances à éviter
• Alcool
Il faut éviter la prise d’alcool car l’alcool favorise les apnées du sommeil, il perturbe la structure du sommeil, favorise la fragmentation du sommeil qui est donc de moins bonne qualité.
• Nicotine
La nicotine a un pouvoir stimulant, elle augmente le temps d’endormissement, les réveils nocturnes et elle modifie l’architecture naturelle du sommeil.
• Cannabis
Même si le cannabis semble avoir un effet sédatif sur l’organisme, il perturbe les cycles du sommeil en altérant sa qualité. Le sommeil n’est donc pas réparateur. Le fumeur régulier est souvent fatigué et a des difficultés pour se réveiller. Une utilisation intense peut être responsable de symptômes anxieux-dépressifs qui ont une influence néfaste sur la qualité du sommeil. Pendant le sevrage, une insomnie transitoire de quelques semaines est fréquente.

L’environnement

Le lit du nouveau-né et de l’enfant de moins de 6 mois ne doit pas contenir d’oreiller ni couverture ou peluche encombrante.
Le sommier, le matelas et l’oreiller pour l’enfant plus grand doivent être confortables, adaptés aux exigences de l’enfant ou de l’adolescent et pas trop usés (il est conseillé de changer lde matelas en moyenne tous les 8-10 ans)
La chambre doit être bien aérée avant le coucher.
La température idéale de la chambre doit être autour de 18 dégrés.
Le pyjama ne doit pas être encombrant ou trop chaud.
Il importe de minimiser le bruit.
Il faut faire l’obscurité dans la chambre avec des rideaux ou volets opaques, pas d’écrans allumés.
Il faut proscrire les téléviseurs, ordinateur ou téléphone portable dans la chambre.

Pour en savoir plus

INSTITUT SOMMEIL ET VIGILANCE « Sommeil un enjeu de santé publique »
Editions Alpens 2005
« LE TROUBLES DU SOMMEIL » Michel Billard, Yves Dauvillers
Editions Masson 2011
« LA GUIDE DU SOMMEIL » M.F. Vecchierini
Editions Libbey 1997